Un instant magique
Chaque sortie réserve son lot de surprises, bonnes ou mauvaises, et c'est bien souvent lorsqu'on s'y attend le moins que l'on découvre des petites merveilles.
En progressant lentement dans la forêt vers une zone d'affût, j'aperçois entre les arbres une chevrette occupée à grapiller quelques feuilles dans un roncier. Elle semble tranquille mais néanmoins très attentive au moindre bruit.
Elle remonte lentement un petit sentier avant de s'allonger dans les hautes herbes puis commence à ruminer.
La forêt est très calme, seuls quelques cris de geais viennent parfois couvrir le bruit du torrent qui nous sépare. Une oreille pointée vers le haut, l'autre vers le bas, la chevrette attentive perçoit tous les sons.
Plus d'une heure s'écoule sans que rien ne se passe. Immobile, je commence à ressentir le froid, et plusieurs fois je suis tenté de m'éclipser mais un secrêt espoir me retient sur place...
La chevrette attrape quelques herbes à portée de dent puis se relève enfin et reprend sa cueillette dans un buisson d'orties...
Les orties s'agitent soudainement devant elle, et j'aperçois alors ce que j'espérais tant...
En effet, les chevrettes ont mis bas depuis quelques semaines maintenant et les faons passent la majorité de leur temps tapis dans les hautes herbes non loin de leur mère. Leur pelage tacheté est un camouflage très efficace et ils semblent ne pas avoir d'odeur pour ne pas attirer des prédateurs opportunistes.
Le faon ne s'éloigne guère de sa mère, mais ces quelques mètres semblent être pour lui déjà tout une aventure, et l'occasion de dégourdir encore maladroitement ses grandes pattes et de faire quelques cabrioles...
Il tête goulument en suivant la progression de sa mère...
Je savoure pendant près d'une demi-heure ce moment d'intimité, bien conscient de la chance que j'ai d'être là.
Puis le faon rejoint seul le buisson d'orties et la mère repart de son côté explorer d'autres ronciers. J'en profite alors pour me retirer et quitter la forêt.
Il peut arriver que l'on tombe par hasard sur un faon, sa seule défense sera de rester immobile et même s'il peut paraître abandonné, sa mère n'est sûrement pas très loin. Il ne faut surtout pas le toucher, l'odeur de l'homme dont il sera alors imprégné, risque de causer son abandon...